Arbitrage prime / dividendes 2018 : entre année blanche et flat tax, comment faire le bon choix ?
Préambule
A compter du 1er janvier 2019, l'impôt sera prélevé directement sur les revenus au moment de leur perception.
Pour éviter un double prélèvement en 2019 (les revenus perçus en 2018 et sur les revenus faisant l'objet d'un prélèvement à la source en 2019), un crédit d'impôt appelé CIMR sera accordé sur les revenus non exceptionnels perçus en 2018 entrant dans le champ du prélèvement à la source. A ce titre, les salaires et traitements sont considérés comme des revenus non exceptionnels.
Les revenus exceptionnels de 2018, ainsi que certains revenus non concernés par le prélèvement à la source, dont notamment les dividendes, resteront imposés.
En théorie, le CIMR a pour conséquence d’annuler l’impôt payé sur les revenus non exceptionnels 2018 (d’où l’expression « année blanche »). En s’arrêtant ici, le chef d’entreprise pourrait légitimement penser que si l’impôt est totalement effacé, il aurait tout intérêt à augmenter sa rémunération en 2018.
Malheureusement pour lui, le législateur a prévu une parade à la majoration artificielle de ses revenus. En effet, l’impôt sur la fraction des revenus des dirigeants et des indépendants de 2018 qui excèderaient ceux perçus les trois années précédentes ne sera pas effacé, sauf si la rémunération de 2019 dépasse finalement celle perçue en 2018.
Un exemple pour mieux comprendre
Commerçant exerçant en EURL à l’IS, célibataire qui déclare en 2018 une rémunération nette de 96 350 € soit 100 000 € à déclarer (réintégration de la CSG non déductible). La rémunération nette imposable est égale à 90 000 € (après abattement forfaitaire de 10%).
Le montant de son impôt théorique est de 23 205 €.
Dans un premier, il convient de déterminer quelle est la part de la rémunération considérée comme non exceptionnelle. Pour ce faire, il faut comparer la rémunération nette imposable 2018 à celles des 3 années précédentes en retenant la plus élevée des 3.
Hypothèse :
Rémunération nette imposable 2015 : 60 000 €
Rémunération nette imposable 2016 : 70 000 €
Rémunération nette imposable 2017 : 80 000 €
On retiendra ici la rémunération nette imposable 2017 et donc la part des revenus non exceptionnels s’élève à 80 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 90 000 € - 80 000 € soit 10 000 €).
Dans un second temps, nous pouvons déterminer le montant du CIMR :
CIMR = Impôt sur le revenu x (Revenus non exceptionnels / Rémunération nette imposable 2018)
CIMR = 23 205 € x (80 000 € / 90 000 €)
CIMR = 20 627 €
L’impôt restant à payer est donc de 2 578 € (impôt théorique - CIMR)
Un CIMR complémentaire (restitué en 2020) est accordé si la rémunération nette imposable 2019 est supérieure à celle de 2018. Nous retenons l’hypothèse d’une rémunération nette imposable en 2019 équivalente à celle de 2018 soit 90 000 €.
Dans ce cas d’espèce, la rémunération 2018 sera considérée comme non exceptionnelle (le revenu exceptionnel étant égal à 90 000 € - 90 000 € soit 0 €).
Le CIMR complémentaire sera calculé ainsi :
CIMR complémentaire = Impôt sur le revenu x (Revenus non exceptionnels / Rémunération nette imposable 2018)
CIMR complémentaire = 23 205 € x (90 000 € / 90 000 €)
CIMR complémentaire = 23 205 €
Un CIMR de 20 627 € ayant déjà été versé, le CIMR complémentaire sera de 2 578 €. Ce montant sera restitué en 2020.
Si l’on « écrase » la fiscalité dans le temps, le montant de l’impôt à payer sera de 0 € au titre des revenus 2018 (impôt théorique – CIMR – CIMR complémentaire)
Arbitrer entre rémunération de gérance et dividendes
Supposons que notre commerçant dispose d’un budget de 50 000 € et envisage de distribuer l’intégralité de ce dernier. Nous retiendrons 3 scénarios tenant compte d’un assujettissement des dividendes aux charges sociales dès le 1er euro.
La distribution sous forme de prime de gérance
Sur la base d’un budget de 50 000 €, le montant de la prime nette s’élève à 38 018 € (11 982 € de charges sociales supplémentaires). En ajoutant ce montant à la rémunération perçue sur l’exercice soit 96 350 €, ses revenus s’élèvent à 134 368 € soit 139 375 € à déclarer (réintégration de la CSG non déductible). La rémunération nette imposable est égale à 127 070 € (après abattement forfaitaire de 10%).
Le montant de son impôt théorique s’élève à 38 404 €.
Détermination du CIMR
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons la rémunération nette imposable 2018 à celle de 2017. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 80 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 127 070 € - 80 000 € soit 47 070 €).
Le CIMR est donc égal à : 38 404 € x (80 000 € / 127 070 €) soit 24 178 €.
L’impôt à payer en 2019 s’élèvera à 14 426 € soit 38 404 € – 24 178 €.
Détermination du CIMR complémentaire
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons rémunération nette imposable 2018 à celle de 2019. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 90 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 127 070 € - 90 000 € soit 37 070 €).
Le CIMR complémentaire est donc égal à : 38 404 € x (90 000 € / 127 070 €) soit 27 200 €.
Un CIMR de 24 178 € ayant déjà été versé, le CIMR complémentaire sera de 3 022 €. Ce montant sera restitué en 2020.
Si l’on « écrase » la fiscalité dans le temps, le montant de l’impôt à payer sera de 11 204 € au titre des revenus 2018 (impôt théorique – CIMR – CIMR complémentaire)
La distribution sous forme de dividendes
Sur la base d’un budget de 50 000 €, le montant des dividendes bruts s’élève à 33 380 € (après charges sociales et impôt sur les sociétés).
En synthèse :
Pour mémoire les dividendes sont considérés comme des revenus exceptionnels et n’entrent pas dans la détermination du CIMR
Hypothèse 1 : Dividendes soumis au barème progressif
Le montant de l’impôt théorique s’élève à 31 856 €.
Détermination du CIMR
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons la rémunération nette imposable 2018 à celle de 2017. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 80 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 111 101 € - 80 000 € soit 31 101 €).
Le CIMR est donc égal à : 31 856 € x (80 000 € / 111 101 €) soit 22 938 €.
L’impôt à payer en 2019 s’élèvera à 8 918 € soit 31 856 € – 22 938 €.
Détermination du CIMR complémentaire
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons rémunération nette imposable 2018 à celle de 2019. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 90 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 111 101 € - 90 000 € soit 21 101 €).
Le CIMR complémentaire est donc égal à : 31 856 € x (90 000 € / 111 101 €) soit 25 806 €.
Un CIMR de 22 938 € ayant déjà été versé, le CIMR complémentaire sera de 2 868 €. Ce montant sera restitué en 2020.
Si l’on « écrase » la fiscalité dans le temps, le montant de l’impôt à payer sera de 6 050 € au titre des revenus 2018 (impôt théorique – CIMR – CIMR complémentaire).
Hypothèse 2 : Dividendes soumis au PFU
Le montant de l’impôt théorique s’élève à 27 918 € dont 23 645 € au titre de la rémunération et 4 273 € au titre du PFU sur dividendes.
Détermination du CIMR
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons la rémunération nette imposable 2018 à celle de 2017. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 80 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 91 073 € - 80 000 € soit 11 073 €).
Le CIMR est donc égal à : 23 645 € x (80 000 € / 91 073 €) soit 20 770 €.
L’impôt à payer en 2019 s’élèvera à 7 148 € soit 27 918 € – 20 770 €.
Détermination du CIMR complémentaire
Sur la base de nos hypothèses précédentes, nous comparons rémunération nette imposable 2018 à celle de 2019. La part des revenus non exceptionnels s’élève à 90 000 € (le revenu exceptionnel étant égal à 91 073 € - 90 000 € soit 1 073 €).
Le CIMR complémentaire est donc égal à : 23 645 € x (90 000 € / 91 073 €) soit 23 366 €.
Un CIMR de 20 770 € ayant déjà été versé, le CIMR complémentaire sera de 2 596 €. Ce montant sera restitué en 2020.
Si l’on « écrase » la fiscalité dans le temps, le montant de l’impôt à payer sera de 4 552 € au titre des revenus 2018 (impôt théorique – CIMR – CIMR complémentaire)
Synthèse comparative
Dans notre cas d’espèce, le chef d’entreprise a intérêt à privilégier la distribution de dividendes et opter pour le PFU. Bien évidemment, la modification d’un seul des paramètres (statut social, montant de la distribution, contexte fiscal…) pourrait conduire à
des résultats différents et il est indispensable de traiter au cas par cas.
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